Dans un contexte particulièrement tendu ces derniers mois entre difficulté des Français à financer leurs projets immobiliers d’un côté, explosion des prix du foncier et des coûts des matériaux de l’autre, deux phénomènes qui ont fait s’effondrer le secteur du neuf en recul de 40 % en 2023 (le chiffre de 70 % de chute des réservations se murmure même chez certains promoteurs), la réaction du gouvernement à cette crise de l’immobilier qui s’amplifie était très attendue.
Les espoirs des professionnels de l’immobilier étaient d’autant considérables que, pendant 8 mois, plus de 200 personnalités ont phosphoré dans le cadre du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement afin de présenter un ensemble de 200 propositions susceptibles de répondre aux multiples problématiques du moment.
L’ambition était forte puisqu’il s’agissait de favoriser l’accession à la propriété, favoriser l’accession à la location, soutenir la rénovation des logements sociaux, soutenir la production de logements sociaux, relancer la construction de logements neufs et enfin amplifier la rénovation énergétique du parc de logements anciens.
Au final, le gouvernement a choisi de ne retenir que très peu de propositions du CNR pour, à l’inverse, choisir de couper les dépenses. Annoncée il y a quelques jours, la prolongation du Prêt à taux zéro (PTZ) sera bien effective puisque le dispositif d’aide aux primo-accédants est reconduit jusqu’en 2027.
Mais les conditions pour y prétendre se complexifient. Le PTZ ne concernera plus que l’acquisition de logements collectifs neufs en zone tendue (soit un peu plus de 1 000 communes en France), et l’acquisition de logements dans l’ancien sous conditions de travaux. Autant dire que le nombre de ménages qui y auront accès va fondre comme neige au soleil.
Le gouvernement a également confirmé la fin de la loi Pinel, dispositif défiscalisant qui permettait aux particuliers d’investir dans du logement locatif. Elisabeth Borne a plutôt privilégié des mesures qui montrent une volonté du gouvernement de reprendre la main avec le rachat aux promoteurs de 47 000 logements qui n’étaient pas vendus.
Autres mesures à retenir, l’extension de la garantie Visale à 1 million de locataires supplémentaires, caution délivrée aux propriétaires loueurs par Action Logement, le renforcement du dispositif MaPrimeRenov’, le lancement d’un chantier sur la fiscalité des biens loués pour contrer les effets de la location touristique, ou encore la prolongation jusque fin 2023 de la mensualisation de la révision des taux d’usure.
Autant dire, rien qui ne puisse relancer significativement le secteur de l’immobilier, lequel exprime depuis lundi sa vive déception. Première à réagir, Véronique Bédague, présidente directrice générale de Nexity et animatrice du CNR, dénonce un plan « imprécis et minimaliste. Il n’y a pas ce coup de pied qui permette de remonter vers le haut de la piscine », assure-t-elle.
Le CNR avait notamment prôné, pour mesure phare, l’encadrement des prix du foncier. La Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) attendait de son côté que soit adopté un statut du bailleur privé et la prolongation de la loi Pinel. Aucune de ces trois mesures n’est finalement au rendez-vous.
« La montagne accouche d’une souris », se désole Pascal Boulanger, président de la FPI, qui craint la suppression de 100 000 emplois ces prochains mois.
D’autres sont plus sévères encore avec le gouvernement. « Il n’y a plus de politique du logement en France », fustige Loïc Cantin, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM), pour qui le secteur est « méprisé. Ces propositions ne sont pas à la hauteur des enjeux et de la crise. »
Ex-ministre, Emmanuelle Cosse juge de son côté que « le gouvernement n’a pas compris la gravité de la crise ». Président de la Fédération du bâtiment, Olivier Salleron est tout aussi déçu. « Nous attendions un électrochoc, c’est une déception. Quasiment aucune des propositions faites par le secteur n’a été retenue », gronde-t-il.
Enfin, le plus virulent est sans conteste Damien Hereng, président de la Fédération des constructeurs de maisons individuelles (FFC). « Nous nous attendions à de mauvaises nouvelles, nous sommes servis ! Le gouvernement souhaite la mort de la construction neuve. Nous sommes devant un gouvernement complétement hors-sol qui a une vision du logement parisienne, oubliant les besoins et les attentes de millions de concitoyens qui n’ont pas pour unique ambition d’être locataire d’un logement social. »
Une vive colère qui ne semble pas prêt de s’éteindre puisque le gouvernement a d’ores et déjà assuré qu’aucune mesure phare n’était à attendre pour faire face à des difficultés qu’il juge conjoncturelles.
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